• Eau Douce

     

    Ou Freshwater en VO.

     

     

     

     

    Résumé de l'éditeur

     

     

    Au Nigéria, dans la cosmologie igbo, lorsqu’un enfant est dans le ventre de sa mère, il est façonné par des esprits qui déterminent son destin. Mais à la naissance de la petite Ada, les portes entre le monde des humains et celui des esprits se sont temporairement ouvertes, le temps pour ces derniers de s’immiscer dans le corps de la fillette et de s’y trouver bloqués.
    Un pied dans le monde des vivants, un pied dans le monde des esprits, Ada va ainsi grandir envahie par un cortège de voix qui vont se disputer le contrôle de sa vie, fractionnant son être en d’innombrables personnalités.
    Mais lorsque Ada quitte son berceau géographique pour faire ses études aux États-Unis, un événement traumatique d’une violence inouïe va donner naissance à un nouvel esprit, beaucoup plus puissant, beaucoup plus dangereux. Ce nouveau «moi» prend possession d’elle et se nourrit de ses désirs, de sa colère et de sa rancœur. La vie de la jeune fille prend alors une tournure de plus en plus inquiétante, où la mort semble devenir une séduisante échappatoire.

     

    Ouais c'est un peu long mais j'avais la flemme de rédiger un résumé moi-même. J'ai déjà la flemme d'écrire sur ce blog alors bon...

     

    Je suis tombé sur ce livre totalement par hasard. Enfin il était en vitrine et m'a intrigué. Akwaeke Emezi, ça sonnait nigerian. Ca parlait de cosmologie igbo même. Alors je l'ai acheté direct, comme ça. Sans réfléchir.

     

    Avant tout un petit mot sur l'auteur.e (c'est comme ça qu'on écrit je crois) gentiment fourni par Wikipedia:

     

    Akwaeke Emezi, née en 1987 à Umuahia au Nigeria, est une personnalité nigériane, écrivaine non-binaire, d'origine Igbo et Tamoul.  Akwaeke Emezi se décrit comme « Nigériane, noire, trans et non-binaire ». Emezi utilise le pronom they singulier en anglais.

     

    Trans... non binaire... WTF!! Moi qui l'avais juste acheté parce qu'elle avait un nom nigerian, igbo qui plus est (d'ailleurs ma famille vient de la même région qu'elle, j'y suis allé à Umuhaia), et de la religion igbo que je ne connais pas. Je comprends pourquoi le vendeur, un Noir à dreadlocks sympa, m'a regardé avec étonnement quand j'ai dit que le livre était pour moi (surtout que je l'ai acheté près du Marais). Si j'avais lu ça avant, je suis pas sûr que je l'aurais acheté. Enfin bon, je ne regrette pas.

     

     

     

     

    Akwaeke Emezi

     

     

     

    Pour reprendre la description Wikipedia, il est précisé qu'elle est la première personnalité trans à avoir remporté le prix Baileys Women's Prize for Fiction, un prestigieux prix littéraire anglo-saxon. Il est aussi précisé plus bas qu'elle a transitionné à 28 ans et qu'elle a raconté le parcours dans des articles. Cool...
    Notons aussi que sa soeur cadette, Yagazie Emezi, est une photographe assez réputée (plutôt charmante qui plus est).

     

    Je pense que malgré tout ce qu'on peut se dire, chacun a ses limites quand il s'agit de tolérance. En ce qui me concerne, si les gays me font en général ni chaud ni froid, j'ai toujours eu du mal avec le transexualisme. Quand je parle de tolérance j'en parle pas avec méchanceté mais plutôt comme acceptation d'une certaine normalité. Physiquement déjà, c'est un truc qui m'a longtemps fait flipper (comme les clowns ou les mimes). Je vais faire dans le cliché du Brésilien du Bois de Bou mais une meuf musclée d'1m90 avec une voix plus grave que la mienne, ça me met clairement mal à l'aise. Peut-être parce que mon cerveau n'arrive pas à identifier clairement de quoi il s'agit. Je caricature évidemment mais dans le fond je le pense vraiment.

    J'aurais beau dire que je m'en fous, que chacun fait sa vie et que je ne veux pas juger, ça ne m'empêche pas de penser que le transexualisme relève de la psychiatrie. Après si ça peut aider des femmes nées dans des corps d'hommes ou le contraire à se sentir enfin comme ils ou elles devraient l'être, tant mieux. Le pire étant que c'est quelque chose qui existe dans de nombreuses cultures depuis des siècles comme les hijras en Inde, les fakaleiti dans les îles Tonga etc. D'ailleurs, il y a dix ans j'avais été dans une resto polynésien super bon, tenu par des... ben par des "femmes" quoi. Etrange au début de voir des serveuses balèzes, puis on s'y fait. C'est à cette époque que j'ai appris l'existence des "mahu" en polynésie.

     

     

     

    Enfin bref, pour en revenir au bouquin, le fait d'avoir appris ça en cours de route m'a un peu perturbé. Je ne savais pas si Akwaeke était née homme ou femme. Au final ça n'importe pas tant et on finit par l'apprendre assez rapidement. Akwaeke  tout comme son alter ego Ada sont nées femmes et le sont restées au moins jusqu'à 28 ans.

    Le livre m'a donc un peu perturbé au départ d'autant plus que l'héroïne ne s'exprime quasiment jamais directement. Ce sont les ogbanje qui parlent à sa place la plupart du temps. Pour faire simple, les ogbanje ce sont des esprits qui intègrent les corps à la naissance, des esprits pas forcément bienveillants qui plus est. Un peu comme les "jnoun" quoi. Et ces ogbanje ont guidé la vie chaotique de l'Ada. Emezi écrit d'ailleurs la plupart du temps l'Ada au lieu d'Ada, comme pour accentuer la dépersonnalisation de son héroïne, car elle est en général davantage un véhicule pour les esprits qui habitent son corps qu'un être à part entière. Ce procédé lui permet aussi une certaine distanciation vis à vis de son alter ego, et donc un certain recul vis à vis des épreuves qui ont jalonné sa vie. 

    C'est assez difficile de parler du roman sans en révéler l'intrigue. Pour faire simple, j'ai eu un peu de mal à entrer dans le livre. Non qu'il soit mal écrit ou autre (c'est bien écrit et bien traduit). Simplement j'ai eu un peu de mal à accrocher au délire des ogbanje et du roman écrit à la première personne du... pluriel (le pire étant que selon Wikipedia elle utilise le pronom "they" pour parler d'elle). J'ai trouvé ça un peu facile, et surfait au début, comme un gimmick d'écriture, puis comme un prétexte servant à déresponsabiliser l'Ada de ses mauvais choix et ses mauvaises actions. Et puis mon impression a changé en cours de route. On se prend au jeu des ogbanje et de ses conversations avec ce qui ressemble à autant différentes personnalités d'elle-même, et on en vient irrémédiablement à se demander si toute la mystique autour des ogbanje n'est pas une manière polie de parler de schizophrénie, Akwaeke étant totalement consciente de la mince frontière entre les deux. Et au fur et à mesure que j'ai lu et découvert la vie chaotique de l'Ada, j'ai été pris d'un sentiment assez trouble quelque part entre la pitié; la compassion pour ce personnage totalement instable et torturé, qui plonge dans l'auto destruction comme si cela apaiserait ses blessures les plus profondes.

    C'est assez triste, d'autant plus que si salut il y a, il ne vient que par l'acceptation de toutes ses composantes qui font d'elle ce qu'elle est.

     

    Pour résumer, Eau Douce est un beau roman, une belle histoire autobiographique assez émouvante, peut-être un peu inégale, mais qui ne sombre jamais dans le pathos.

     

    Bonne découverte.

     

    Allez next.

     

     

    A noter: une série adaptée serait en préproduction. Pas hyper convaincu personnellement, le roman se suffisant amplement à lui-même je pense..

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