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    Je suis dans un trip espionnage en ce moment alors...

     

    Résumé:

    Un couple d'Anglais en vacances à Marrakech sympathise avec un excentrique millionnaire Russe. Ils comprennent bien vite que ce dernier blanchit l'argent de la mafia russe.

     

     

     

     

    C'est marrant sans en dire trop je viens à peine de capter que le pitch de départ est très proche de L'Homme Qui en Savait Trop d'Alfred Hitchcock: couple d'Anglais, Marrakech, un ami étranger, un message...
    Avec Ewan McGregor dans le rôle de James Stewart. Le film souffre d'entrée de jeu de la comparaison. Enfin j'exagère, j'avais même pas calculé en matant le film.

     

    C'est drôle comme la mafia russe peut exercer un pouvoir de fascination. Peut-etre qu'on a trop parlé de la mafia (même si en vrai c'est surtout la mafia italo américaine qui est mise à l'honneur dans les fictions). Et puis comme les Ruskov se trainent une réputation de barbares sanguinaires (pléonasme?) ça fait fantasmer les scénaristes on dirait.

     

     L'histoire est en fait assez bateau, des méchants russes, des espions troubles, des enjeux géopolitiques. Rien de neuf sur la Volga. Néanmoins il y a tout de même deux gros problèmes. Le premier est d'ordre scénaristique. Je ne sais pas à quel point le film est fidèle au roman de John Le Carré (qui reste une des références absolues en termes d'espionnage réaliste) mais je pense qu'Hossein Amini à taillé l'intrigue à la hache. En effet comment est-ce qu'on peut croire qu'un mr Smith (un Dupont british quoi) va de son plein gré s'immiscer dans une histoire mêlant des gros Ruskov tatoués qui découpent des gens et le MI6 qui comme toute agence d'espionnage n'hésite pas à se débarrasser de quiconque pour préserver les intérêts du pays et du service? Le mec est prof de poésie wesh! Et comment expliquer que sa femme, une avocate réputée, le soutienne? Tout le monde se met sur pause et on va aider Popov qui nous a payé un verre et balancé deux blagues, même si Popov a lui aussi plein de sang sur les mains, mais c'est pas grave parce qu'il est cool Popov.  

     

     

    Dima (Stellan Skarsgard), le gentil Popov

     

     

     

    Deuxième problème: la réal. Pas qu'elle soit vilaine, elle est relativement sobre voire trop, simplement elle est vraiment en mode pilotage automatique. Lumière désaturée parce que c'est un film d'espionnage et que le monde n'est pas tout blanc ou tout noir. Aucune réelle tension soulignant les enjeux. C'est bien simple on ne sent pratiquement jamais que machin est vraiment en danger... sauf quand il se retrouve dans les tours de  Pablo à Nanterre et que des "jeunes délinquants" tournent autour de leur voiture en faisant de la bécane (!!!). Pas trop compris le rapport avec le reste et l'intérêt de la séquence mais bon.

     

     

    Perry (Ewan McGregor) et Jesse (Naomie Harris), un gentil couple uni dans l'adversité (et à Paris)

     

     

    J'ai pas envie de faire le macho mais bon on voit que c'est une meuf qui réalise. Y a de très  bonnes réalisatrices, simplement dans les genres traditionnellement masculins (action, thriller etc) y a pas foule. Et Susanna White n'est pas Kathryn Bigelow quoi, c'est plutôt la meuf qui a réalisé Nanny McPhee. C'est un peu mou. En plus y a certains plans foireux genre la scène d'introduction avec un danseur de ballet brésilien en tutu (???) ou encore ce plan final totalement hors sujet (déjà que la fin est expédiée).

    Côté interprétation par contre c'est nickel avec le toujours bon Ewan McGregor, le toujours classieux Damian Lewis, la toujours jolie Naomie "Moneypenny" Harris (dommage qu'on la voit pas en petite tenue). Ah ouais par contre Stellan Skarsgard cabotine pas mal dans le genre. Pourquoi ils ont pas pris un vrai? Dans John Wick c'était déjà Michael Nyqvist, un Suédois quoi jouait un Russe. C'est une habitude ou quoi? Bon en même temps je viens de voir que Susanna White avait déjà bossé avec le fils Skarsgard (Alexander) donc ça a du jouer.

     

     

    Hector (Damian Lewis) qui joue à George Smiley (ou Gary Oldman, c'est selon)

     

    A me lire on pourrait croire que j'ai passé un sale moment mais c'est même pas le cas. Le film se laisse voir sans déplaisir. C'est juste qu'il est un peu lège pour un film d'espionnage, surtout après les dernières adaptions de Le Carré comme La Taupe et A Most Wanted Man.

     

     

    Juste un gentil petit divertissement totalement inoffensif.

     

     

     

     

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    Oh la belle affiche!

     

     

     

     

    Elle est d'ailleurs bien plus dans l'esprit du film que celle qu'on nous a imposé car plus "glam" (avec le sosie officiel de Cara Delevingne)

     

     

    Le résumé (pris sur wiki, la flemme) :

     

    Jesse, une jeune fille souhaitant devenir mannequin, se rend à Los Angeles pour réaliser son rêve. Celui-ci tourne très vite au cauchemar lorsqu'elle réalise qu'elle est l'objet de tous les désirs de femmes obsédées par sa beauté et sa vitalité et qui sont prêtes à tous les moyens nécessaires pour s'en emparer.

     

     

     

     

     

     

     

    Ca faisait longtemps que j'avais pas vu des gens quitter une salle en cours de séance ha ha!

     

    Ce qu'il y a de bien avec Refn c'est qu'il y a toujours quelque chose d'intéressant dans ses films. Encensé avec Drive puis jeté aux chiottes avec Only god Forgives, il a au moins le mérite d'aller au bout de sa démarche. D'ailleurs ses deux derniers films sont si barrés que j'ai limite eu l'impression qu'il les avait réalisés en réaction au succès de Drive. Dans tous les cas il y a toujours à grailler avec lui.

     

    C'est dommage que je n'ai finalement pas trop de quoi meubler surtout que je l'ai vu la semaine dernière déjà.

    Après un Only God Forgives déjà bien barré, Refn continue sur sa lancée "anticonformiste" avec cet espèce d'ovni. Bien qu'il soit plus abouti que le précédent on sent toujours une volonté de rompre avec les codes et les cases, comme s'il les avait écrits et réalisés c'était en réaction au succès d'un Drive plus consensuel (je l'ai djà dit? Je devrais me relire plus souvent je crois).

     

     

    Séquence psychédélique à l'horizon

     

     

    De ce fait, on a bien du mal à vouloir classer ce film et c'est pas plus mal. Les distributeurs, les gens de la com et les journalistes ont d'ailleurs fini par se ranger derrière l'étiquette "épouvante" pour le vendre. Mouais...

    C'est bien ça le truc, The Neon Demon n'est pas vraiment un film d'horreur ou d'épouvante à proprement parler. Certes, y a du sang, quelques passages qui mettent plus mal à l'aise qu'ils effraient, mais c'est tout. Ca en fait pas un film d'horreur pour autant.

    The Neon Demon, c'est un peu un trip sous substances, autour d'une fille tellement belle qu'elle ne laisse personne indifférent: certains sont éblouis, d'autres sont jaloux, la plupart veulent la troncher. Et tous ces sentiments s'exacerbent quand elle perd sa candeur et prend réellement conscience de son pouvoir de séduction.

     


     Jesse (Elle Fanning), le diamant brut (mais alors vraiment brut)

     

    Apparemment le père Refn a écrit sous influence de Jodorowsky (El Topo, La Montagne Sacrée etc). Bon j'ai jamais vu aucun de ses films mais il parait qu'ils sont très bien et que l'influence se voit à l'écran.

     

     Comme à son habitude, Refn ne fait pas dans la dentelle, à grand coup de métaphores sexuelles où le désir côtoie le morbide, où la beauté de certaines séquences succède à d'autres à la limite du ridicule. D'ailleurs en bon pervers j'ai eu le même genre de pensées en voyant le cou de l'héroïne qu'en regardant Fanny Agostini présenter la météo sur BFM (hé hé!), bon bah en fait c'est pas anodin.

     

     

    Séquence perchée à l'horizon

     

    Côté interprétation donc, en plus de son grand cou, Elle Fanning (la soeur de Dakota) est très convaincante. C'est un choix pertinent dans la mesure où elle n'est pas magnifique comme dans un banal film ricain, mais qu'elle est en fait une espèce de diamant brut, une fille avec un énorme potentiel qui se révèle progressivement. A  ses côtés Bella Heathcote est assez géniale en mannequin d'une beauté très "américaine" (comprendre artificielle), et son regard perçant la rend bien flippante. Jena Malone quant à elle incarne parfaitement l'ambigüité du personnage de Ruby à la fois sympathique et malsaine.

     

     Ruby (Jena Malone), une maquilleuse obsédée par la beauté de Jesse

     

    Bref faut pas chercher midi à 14h, Refn fait du Refn. Ceux qui chercheront un nouveau Drive passeront leur chemin, ceux qui savent à quoi s'attendre ne seront probablement pas déçus. The Neon Demon, malgré ses dérives auteurisantes et certains écarts un peu lourdingues, est un beau film qui doit beaucoup à ses qualités formelles (la magnifique photo de Natacha Braier et la superbe musique de Cliff Martinez, fidèle collaborateur du réal depuis Drive), et reste une jolie et sombre fable sur la beauté, la superficialité (ça se dit?) et le passage à l'âge adulte.

     

     Ah oui et puis rien que pour la prestation improbable de Keanu Reeves et l'apparition de Christina Hendricks (je suis fan depuis Mad Men) il vaut le coup.

     

     

     

     

     

     

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  • Vu un peu par curiosité:

     

     

     

    résumé:

    Un ex avocat devenu spécialiste en fraude à l'assurance tombe amoureux d'un médecin urgentiste. Et c'est tout

     

     

    Le trailer officiel

     

    Et voilà. Il se passe pas grand chose de plus. Bon j'abuse un peu, il va y avoir une couille un moment et tout va partir en vrille comme d'hab.

    Pour faire simple, le film s'inscrit dans la tradition des polars nocturnes comme Bad Lieutenant, Taxi Driver, voire Drive ou Nightcrawler, avec sa galerie de personnages torturés et hors du monde réel, et son ambiance poisseuse à souhait. Seulement voilà, si l'ambiance est bien retranscrite (Buenos Aires fait vraiment pas envie), l'intrigue n'est pas à la hauteur. Il ne se passe pas grand chose en fait, et je me suis un peu fait chier. La faute à un problème de rythme et d'enjeux dramatiques. La caméra passe son temps à suivre Lauja, la jolie urgentiste (mme Trapero dans la vraie vie) se débattre entre le manque de moyen, le manque de sommeil, la mort et la violence ordinaire. De son côté Sosa poursuit ses arnaques  tout en s'obstinant dans sa quête de rédemption.

     

     

    Heureusement le film bénéficie d'une très bonne mise en scène et surtout il est porté par une excellente interprétation de Martina Gusman et de Ricardo Darin, acteur Argentin phare qu'on a pu voir quand 90% des métrages argentins distribués en France (Les Neuf Reines, Los Ojos, Les Nouveaux Sauvages...). C'est d'ailleurs leur relation qui est le gros point fort du film. La rencontre (et la déchéance) entre deux âmes perdues, meurtries et solitaires est très émouvante.

     

     

     

     

    Réalisé par Pablo Trapero à qui on doit également le  très réussi El Clan dont je parle ICI, Carancho est un beau film, qui même s'il pêche un peu à cause d'un script trop linéaire, reste très intéressant compte tenu du sujet qu'il aborde.

     

    Un bon petit film

     

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    Y a des bouquins qui marquent à leur lecture, comme ça. 

     

     

    Le résumé :

     

    Hajime est un homme accompli, père de famille et heureux propriétaire d'un club de jazz de Tokyo. Lorsqu'un beau jour, son amour d'enfance, Shimamoto-san, surgit dans son bar. Les retrouvailles avec cette femme insaisissable, qui n'apparaît que les jours de pluie, plongent Hajime dans l'abîme d'une quête obsédante, contre la course du temps et des sentiments...

     

    Je ne pense pas être le seul mais j'ai toujours confondu les écrivains Haruki Murakami et Ryo Murakami. En même temps quelle idée d'avoir le même nom, presque le même âge, et le même métier... En cours de lecture j'ai d'ailleurs découvert un troisième illustre Murakami (Takeshi), bien connu des amateurs d'arts vu qu'il est l'un des artistes les plus chers au monde apparemment (rien que ça).

     

    Haruki Murakami
     

     

    Pour en revenir à celui qui nous intéresse, j'ai été intéressé par ses romans aux titres assez intrigants comme Kafka sur le Rivage ou 1Q84. Alors quand j'ai vu ce bouquin à la FNAC, pas trop cher et pas trop long, je me suis dit que c'était le moment.

     

    Il y a des livres qui marquent à leur lecture parce que l'histoire qu'ils racontent nous parle assez profondément. Je n'ai pas la situation sociale de Hajime, je n'ai pas d'amie d'enfance qui serait une âme sœur absolue. Je n'ai pas d'amie aussi proche au point d'être totalement en phase sur tout. Pourtant ce livre me parle énormément. Je l'ai acheté l'année dernière en même temps que Neige d'Orhan Pamuk mais il a fallu que je le lise maintenant, quand j'ai le même âge que le héros durant la plus grande partie de l'histoire.

     

     Il est aisé de voir dans le roman des relents autobiographiques, et dans le personnage de Hajime un alter ego de l'auteur avec lequel il entretient de nombreuses similitudes. D'ailleurs bien qu'il traite (vaguement) d'adultère, ce livre c'est aussi et surtout l'évocation du passé, de la nostalgie, du temps révolu, d'un désespoir et d'un vide que rien ni personne ne peut combler.

    Ces étapes de la vie sont personnifiées sous les traits de Sakamoto San, Izumi et Yukiko. L'existence de Hajime pourrait presque se réduire à la relation qu'il a entretenue avec chacune des trois femmes de sa vie. A travers elles. Comme des Moires où Izumi représenterait les regrets du passé, Sakamoto San un idéal au conditionnel. Quant à son épouse Yukiko, elle serait à la fois le refuge d'un présent réconfortant et la confrontation d'une dure réalité dénuée de rêve, de passion et d'idéal.

     

    Quelque part, ce roman est aussi une allégorie de la crise de la quarantaine, une période charnière dans la vie d'un homme, où il réalise que les rêves qu'il n'a pas concrétisés sont derrière lui et qu'il doit trouver une autre raison de continuer qu'à travers son accomplissement personnel.

     

    Avec son titre inspiré en partie d'une chanson de Nat King Cole (ce qui me fait penser que le livre a dû inspirer Wong Kar Wai pour In The Mood for Love), Haruki Murakami nous raconte une histoire simple, mais une très belle et très touchante. Un des plus beaux romans que j'ai pu lire depuis bien longtemps.

     

     

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    Je viens de voir que j'ai commencé à écrire cet article le 19 mai. Je n'ai pas pu le finir avant plus plusieurs raisons, notamment à cause d'une certaine date dans le calendrier qui m'a un peu affecté. Je pense qu'il était temps de le terminer.

     

    Hier en allant arroser les fleurs sur la tombe de ma mère comme chaque semaine, je me suis rendu compte que quelque chose avait changé. Je n'ai pas envie de sortir les violons, ma mère est partie l'année dernière, c'est la vie et c'est malheureusement dans l'ordre des choses. C'est toujours plus dur à accepter pour les personnes concernées ceci-dit mais c'est comme ça.

     

    Donc hier, en allant au cimetière, j'ai vu que quelque chose avait changé. J'ai l'habitude de regarder les tombes avoisinantes. Quand on va dans un cimetière il y a quelque chose de très fort qui s'en dégage. Au delà de l'atmosphère qui varie selon le temps, la saison et l'architecture du cimetière, c'est l'énorme sentiment de solitude qui est très prenant. Hormis les jours d'enterrement il y a rarement foule dans ce type de lieu. Ceci étant les disparités entre les sépultures sont encore plus parlantes. Il y a plus moins trois types de tombes : les tombes correctement entretenues avec une jolie stèle et les tombes sans stèle qui ne sont ni plus ni moins qu'un cercueil enfoui sous une motte de terre, ce qui pourrait faire penser à une tombe d'indigent. Pourtant, pour ceux qui seraient scandalisés, il faut savoir que le décès de quelqu'un peut coûter très cher à ses proches s'il n'a pas souscrit à une assurance vie. Je dirais que la moyenne se situe aux alentours des 5000-6000€. La mort ne faisant pas l'honneur d'annoncer sa venue, tout le monde ne peut pas se permettre de débourser une telle somme aussi facilement. Il va sans dire que ces tombes là sont les plus tristes.

    Le troisième type est la jolie tombe abandonnée.

     C'est assez simple de reconnaître une tombe laissée à l'abandon. Elle n'a pas de fleurs ou très peu, sèche ou fanées en général, n'est pas du tout entretenue. Son occupant est tombé dans l'oubli. Peut-être qu'il n'a plus de famille, peut-être que sa famille réside dans un autre pays ou qu'elle ne l'aime pas. Peut-être.

     
    Quand je vais au cimetière, j'ai l'habitude de jeter un œil aux autres tombes. Sans faire le poète, elles racontent des histoires. On peut voir si la personne était relativement appréciée, quand elle est née et morte (et par déduction combien de temps elle a vécu), si elle était mariée, sa passion parfois (il y a deux rugbymen dans les environs), et s'il y a une descendance ou du moins une famille restante (les plaques funéraires étant relativement équivoques).

     Une tombe m'a particulièrement interpelé. Il s'agit de la tombe d'un dénommé Alexandre Diarra, né en 1974 et décédé en 1992. En plus d'être mort à 18 ans, ce qui m'a choqué sur la jolie stèle de sa tombe c'est qu'une signature assez particulière est inscrite dessus. En effet elle est ornée d'une gravure calligraphiée façon graffiti représentant  "Ämer".

     

    Le Ministère Ämer

     

    Pour ceux qui ne connaissent rien au rap français (ou qui sont trop jeunes), le Secteur Ä est un collectif emblématique ayant inclus de nombreux artistes phares comme les Negmarrons, Ärsenik, Doc Gyneco et le Ministère Ämer (Stomy Bugsy et Passi). Si chacun d'entre eux a connu son heure de gloire à une époque (Stomy au ciné, et Passi avec ses projets hybrides "Dis L'heure de Zouk/Rock/Rimes"), ceux qui ont connu le Ministère Ämer savent qu'à leurs débuts le groupe était plutôt synonyme d'une certaine violence. Je ne reviendrai pas sur les différentes controverses qui ont traversé leur carrière (surveillance des RG, chansons ouvertement anti police comme le "Sacrifice" ou "Brigitte", rivalité avec NTM...). Si petit que j'étais je me souviens que la violence de la Secte Abdulaï, comme on disait, dépassait le cadre de la musique à Sarcelles et dans les environs.

    On pourra toujours imaginer que le mec est mort d'un cancer ou mais il est fort à parier qu'Alexandre Diarra a été victime d'un accident ou plutôt qu'il est tombé durant une embrouille de bandes rivales à Sarcelles comme il en y avait beaucoup à l'époque.

     Je me suis toujours demandé comment une famille avait pu laisser faire inscrire un truc pareil (Amer) sur la tombe. Probablement qu'il n'en avait pas ou qu'elle n'avait pas les moyens et que ses amis ont cotisé pour lui payer la tombe.

     Toujours est-il que je n'ai jamais vu autre chose qu'un minuscule bouquet composé de deux fleurs toutes fanées dessus.

     

    Hier donc je suis passé, et quelque chose avait changé. La tombe d'Alexandre Diarra avait disparu. Plus de stèle. La terre avait déjà été retournée pour accueillir le futur locataire. Le bail avait expiré.

     

    C'est aussi ça la mort. Des gens proches qui se mobilisent pour un ultime hommage qui vient du cœur. Des gens tristes, qui pleurent, s'effondrent même parfois. Puis on passe à autre chose, la vie continue. Les morts quant à eux finissent pour beaucoup dans l'oubli. Ce n'est la faute de personne, juste la nature qui veut ça. C'est pour cette raison qu'en France le bail d'une concession funéraire est limité à une certaine durée renouvelable uniquement un ou deux ans avant expiration (je viens de voir que des concessions dites perpétuelles existent mais sont sujettes à caution).

    Chaque semaine, je m'efforce d'aller voir ma mère, de nettoyer sa tombe et d'apporter de nouvelles fleurs, non seulement pour entretenir un lien que nous avions lorsqu'elle était encore en vie mais aussi pour que les gens sachent que cette tombe est visitée, et que la personne qui y git manque à quelqu'un et que ses proches pensent encore à elle. J'ai du mal à l'expliquer mais quiconque a enterré quelqu'un de très proche le comprendra aisément C'est important. Dans ma fratrie, je ne pourrais pas dire qui était le plus proche de ma mère mais je pense dire sans trop m'avancer que j'étais probablement celui qui était le plus disponible. Je suis le dernier, j'ai donc toujours été celui qu'elle envoyait faire les courses ou aller à gauche et à droite. Par la suite, j'étais le seul à être véhiculé, et naturellement j'étais le premier qu'elle appelait quand elle avait besoin de quelque chose ou qu'elle avait un problème.
    Chacun a sa manière de vivre un deuil. Ma sœur s'est réfugiée dans les photos et souvenirs mais est incapable d'affronter la douleur d'une visite au cimetière. A contrario j'ai pendant pratiquement plus de six mois été incapable de regarder une photo d'elle. Mais cette tâche hebdomadaire est ma manière de perpétuer ce que je faisais à l'époque. Je m'occupe d'elle d'une certaine façon.

    Chaque fois que je vais au cimetière donc, je regarde l'état des tombes avoisinantes. Chaque fois j'ai un petit pincement au cœur en voyant celles qui semblent abandonnées ou peu visitées, et où des fleurs artificielles sont censées maintenir l'illusion de visites régulières. Pourtant je ne me permettrai jamais de blâmer qui que ce soit. Qui sait si dans dix, cinq ou même dans deux ans j'aurai encore la même rigueur?

    Au vu de sa stèle, Alexandre Diarra a probablement eu les honneurs d'un bel enterrement. Cependant il n'a pas eu la chance d'avoir une tombe régulièrement entretenue. La plupart d'entre nous finiront tôt ou tard dans l'oubli, certains plus vite que d'autres. On essaie juste d'entretenir la mémoire de quelqu'un le plus longtemps possible et puis c'est tout.

     

    Alexandre Diarra est né en 1974 et parti en 1992. Sa tombe a disparu au mois de mai. Je ne l'ai même pas connu mais j'ai une dernière pensée pour lui avant qu'il ne finisse dans l'oubli. Comme chacun de nous.

     

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